Maroc: entre montagnes et déserts

Marrakech

-Ali Baba… Hé Ali Baba, je peux t’aider? Tu cherches ton hôtel, c’est par là mon frère

-Hein, quoi?… C’est moi ça !

Ali Baba par ci, Ali Baba par là. Trop chouette, je mets les pieds pour la première fois au Maroc, à Marrakech et dès mes premiers pas dans la Médina, j’ai l’impression de faire parti du bled. Bon, bon, je suis sûrement pas le premier touriste barbu à me faire interpeller de la sorte, mais c’est le fun!

En arrivant de l’aéroport vers minuit, je pensais trouver la ville calme et endormie, mais j’ai vite compris mon erreur. Après un mois en Norvège où tout ferme à 17 h, où les gens sont discrets et plutôt introvertis, me voici dans la folie des pays du Maghreb, il est minuit et la place Jemaa-el-Fna est plus vivante que jamais. C’est un festival de bruits, d’odeurs, de cris et de musique. Mais je suis trop chargé et fatigué pour l’apprécier alors je pars à la recherche de mon hôtel, saute dans la douche, et mon lit.  

La médina est calme lorsque je sors dans la rue vers huit heures le lendemain, quelques commerçants ouvrent leur boutique, les étals de fruits et légumes arrivés des campagnes environnantes se remplissent, un homme charrie sur son vélo, deux énormes paniers remplis de menthe fraîche et odorante. Je traîne dans le souk encore vide et rentre dans un riad transformé en musée dédié à l’art berbère, initiative privée d’un couple passionné pour les objets traditionnels et le patrimoine marocain. La visite se termine sur la terrasse avec vue sur la ville, c’est calme et agréable d’y prendre un thé. Je pars ensuite visiter les tanneries ou les gens des villages alentour descendent pour traiter et teinter leur peaux.

Je m’installe vers midi, dans un boui-boui partageant ma table avec des ouvriers du coin, pour manger un des meilleurs tajine (au poisson celui-ci) de mon séjour. Je serais d’ailleurs fort déçu le lendemain dans une soi-disant bonne table de Marrakech, ou pour trois plus cher, je mange des plats sans saveurs.

 


M’Goun

Après trois jours passé à Marrakech, départ au petit matin pour Agouti et le Haut-Atlas. Je traverse de grande étendues arides jusqu’à Demnate où je fais une pause pour mettre de l’essence et boire un thé.

J’y fais la merveilleuse rencontre d’Abdellatif, ancien professeur qui passe ses heures perdues dans un café à dessiner sur des feuilles ce qui lui passe par la tête ou les poésies envoyées par une amie marocaine vivant à… Montréal. Chaque jour, depuis,  je crois un an, “Fleur d’amandier” publie via FB, une pensée ou une poésie et lui, la traduit en dessin, avec des crayons, du café, ce qui lui tombe sous la main. C’est simple et beau. Et même si on ne comprends pas l’arabe, la poésie du dessin nous parle. Ce fut vraiment une rencontre des plus agréable. Nous nous reverrons d’ailleurs, quelques jours plus tard pour partager un délicieux dîner chez lui.

Je reprends la route et c’est l’entrée dans les montagnes. Une petite route goudronnée, à une voie, me mène à travers cols et vallées jusqu’au village d’Agouti. J’arrive en fin d’après-midi, juste avant l’orage et m’installe dans l’auberge “La montagne au pluriel”. Petite auberge sympa, mais sans plus, les proprios sont très gentils, mais la bouffe est très sommaire voir insipide. J’y laisse mon sac et ma voiture et pars pour trois jours monter le Jebel M’Goun, deuxième sommet du Maroc que j’ai choisi plutôt que le Toubkal, qui lui est le premier sommet et aussi, évidemment le plus achalandé.

Ici, c’est la tranquillité, peu de monde. La montée vers le plateau de Tarkkedit est assez rude, c’est une bonne première journée. À mi-chemin, je rencontre un jeune marocain de Casablanca qui fait la traversée de l’atlas. Nous passons les derniers kilomètres ensembles. Arrivée sur le plateau, il y a un refuge très simple j’y passe la nuit. Le gardien du refuge ne parle pas un mot de Français alors la conversation sera très courte. Je passe par contre une très bonne nuit seul dans le dortoir et décolle vers 6 h30, le lendemain pour le M’Goun sous un ciel incertain.

La rando jusqu’au sommet est vraiment superbe, une fois le col atteint, on suit une crête sur plusieurs kilomètres jusqu’au sommet. Les nuages m’entourent, me laissant entrevoir de temps en temps la vallée et la vue somptueuse. Par contre, je ne vois pas grand-chose une fois arrivé au sommet et le temps, comme tous les jours, est à l’orage. D’ailleurs, les premières gouttes de pluie me rappellent qu’il est temps pour moi de redescendre et j’arrive à temps au refuge juste avant que nous recevions un déluge de pluie et de grêle. Le plateau se transforme en lac en moins d’une heure, mais c’est un grand soleil qui nous attend le lendemain pour redescendre dans la vallée.

 

 

Vallée de la Tassaout

 

De retour à Agouti, je retrouve Driss, un jeune guide berbère avec qui je discute un moment et qui cherche quelqu’un pour lui monter un site web pour trouver de nouveaux clients. Nous sympathisons et comme son idée m’intéresse, nous décidons de passer quelques jours ensemble. Nous partons nous promener dans la vallée de la Tassaout, près de son village de naissance, pour de superbes randonnées. Nous nous arrêtons dans les villages pour manger et boire le thé, notamment à Megdaz, un des plus beaux du Haut-Atlas central, où nous partageons le tajine avec trois villageois, et le lendemain un méchoui avec l’iman du village qui est aussi apiculteur et produit un miel délicieux.

 

De retour à Demnate, nous nous prélassons pendant quelques heures dans un Hammam après un bon nettoyage au savon noir et gant de crin, revigorant!

Driss ayant un contrat pour quelques jours, je pars de mon côté pour M’Hamid et les dunes de Chigaga.

Erg Lehouri et Erg Chigaga

À cause des pluies diluviennes de la veille, je suis bloqué à Tamegroute, à 1 h 30 de M’Hamid. La route est complètement inondée. Je décide de faire demi-tour jusqu’à Agora et négocie à partir de là un séjour de deux nuits dans l’Erg Lehouri et l’Erg Chigaga. Je pars le lendemain aux aurores avec un couple d’Allemands et nous arrivons vers huit heures au bord des dunes éclairées par le soleil du matin. Même si l’erg Lehouri n’est pas à proprement parlé un désert, le silence, les dunes de sable, le décor ambiant est déjà très relaxant. Après avoir pris quelques photos, je retourne au campement m’installer, dormir un peu et déjeuner. Il y a très peu de monde au alentour et je peux m’asseoir tranquillement au milieu des dunes et méditer, écouter le silence, le vent. Les quelques nuages dans le ciel me protègent du soleil et me permettent de supporter la chaleur.

En fin d’après-midi, je pars pour une petite rando vers d’autres dunes plus éloignées. Après une heure de marche et pouvant presque les toucher, je sens que le temps change et effectivement, derrière ces dunes, le ciel est couleur de sable… Tempête… Hoho !

Tout va très vite, en quelques minutes, les dunes ne sont plus visibles. Je range mon appareil rapidement et fais demi-tour. L’horizon est encore visible dans ce sens, alors je me fixe sur une montagne en face, sachant que le bivouac est sur ma gauche.

Très vite, le sable m’entoure et la visibilité est réduite, Heureusement, j’ai le vent dans le dos, après quelques minutes, j’aperçois deux chameliers et leur troupeau, qui eux font face au vent et au sable sans que cela semble les déranger outre-mesure. Nous échangeons quelques mots et je repars, mais un des garçons m’interpelle immédiatement pour me remettre sur ma route, oups ! Ça ne prends pas grand chose pour se perdre.

Mais heureusement, je retrouve mon bivouac sans encombre et suis dû pour une bonne sieste avant le souper.

 

Départ le lendemain pour l’erg Chigaga, les cours d’eau sont toujours assez hauts et si nous arrivons à franchir les deux premiers sans encombres, nous devons nous résoudre à laisser le 4×4 et traverser à pied la dernière rivière. Les fonds étant sableux, le mélange avec l’eau crée une boue collante ou les véhicules s’enlisent.

Nous marchons une petite heure pour rejoindre l’erg Chigaga et le premier bivouac. Après un bon petit dîner en compagnie de deux fort sympathiques personnes, Ariceu, un touriste brésilien et son guide Mostafa, je pars à la découverte des dunes. Ici, le sable est rouge et s’étend à perte de vue, je marche tranquillement, tantôt sur les crêtes, tantôt dans les creux, “navigant” à vue.

Mais voilà qu’après quelques heures, rebelote, comme un sentiment de “déjà-vu”, le vent de sable s’approche et là, les repères sont moins évident. Je me dépêche de remballer mon stock et de faire demi-tour. J’aperçois de temps en temps la ligne des arbres le long de la rivière et me fixe dessus. Après plus d’une heure et demi je vois enfin ce que je crois être mon bivouac, mais en y arrivant,  je me rends compte que j’ai pas mal dévier et que je dois marcher sur plus de 2 kilomètres sur la piste pour retrouver mon camp. En arrivant, j’apprends qu’un des deux gars responsable du bivouac est parti à ma recherche, mais heureusement,il revient assez vite.

Nous sommes cernés par les orages, les éclairs frappent tout autour de nous, le soleil arrive, de temps en temps, à percer la couche de nuages, créant une lumière magnifique. Nous sommes relativement épargnés par l’averse et la soirée se termine sous une…pluie d’étoiles, magique !

 

Je reprends la route le lendemain après-midi pour Agdz je vais y passer plus de temps que prévu dû à une bonne “tourista”. Après deux jours passer entre mon lit et les chiottes, je repars pour Marrakech retrouver Driss et discuter de notre projet.

Il me reste trois jours, alors direction la montagne et le village d’Imlil. Je prends ça tranquille, quelques petites marches dans les chemins alentour, et beaucoup de chaise longue, grosse couverture et contemplation.

Prendre le temps de repenser à mes 3 semaines passées dans ce pays sublime, à ce mélange incroyable de monts enneigés et de désert brûlant, ce désert qui fut une véritable découverte (et déjà mon envie folle d’y retourner), à toutes ces odeurs enivrantes, à ce café aux épices, à ces pâtisseries délicieusement parfumées et, surtout, à l’incroyable convivialité de ce peuple.

إلى اللقاء و إلى أقرب وقت

 

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